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 Le Cercle fermé par Jonathan Coe

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LP de Savy
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MessageSujet: Le Cercle fermé par Jonathan Coe   Le Cercle fermé par Jonathan Coe Icon_minitimeJeu 2 Fév 2006 - 0:44

Un roman de Jonathan Coe

Vingt ans après

Le romancier britannique dénonce les travers de la société anglaise et critique l'action de Tony Blair

Reprendre ses personnages quand ils ont vieilli, quand leurs illusions se sont frottées aux rugosités de la vie, quand les lendemains ont cessé de chanter ou qu'ils ont cessé de croire, c'est la même chose, aux lendemains qui chantent, quel romancier y résisterait ? Rien de plus déchirant que la vieillesse puis la mort des Mousquetaires, de plus désolant que la prudence de Figaro dans le Paris révolutionnaire de « la Mère coupable », de plus inexorable et drôle que la promotion aristocratique et mondaine de Madame Verdurin dans « le Temps retrouvé », etc.
Le précédent roman de Coe, « Bienvenue au club », c'était Birmingham, les seventies, des adolescents qui se dépêtraient de leurs pre-mières amours, de leurs études turbulentes et de leurs ambitions encore brouillonnes : Benjamin, l'artiste en herbe, fou amoureux de Cicely ; Loïs, dont le petit ami périssait sous ses yeux, victime d'une bombe terroriste de l'IRA déposée dans un pub ; ou encore Doug, dont le père, délégué syndical de British Leyland, cachait ses liaisons adultères avec Miriam dans les vestiaires de l'usine... Ils sont désormais devenus des adultes, des parvenus ou des revenus de tout, dans les années blairistes où s'épanouissent le néotravaillisme, l'arrivisme des uns, le cynisme des autres, les contorsions des députés du Labour qui veulent justifier l'intervention britannique en Irak, etc.
Bien entendu, Coe excelle à reconstituer, voire à dénoncer le climat de son temps, sa sensibilité, son idéologie rampante, ses modes de vie, ses tics de langage. Il n'est pas pour rien l'un des meilleurs romanciers britanniques. Le titre de son second volet, « le Cercle fermé », n'en est pas moins inapproprié. On parlerait plus volontiers en français de boucle bouclée. Car c'est bien de cela qu'il s'agit. Les copains de Birmingham se sont éloignés les uns des autres avec l'âge. Ils sont devenus journalistes, parlementaires, industriels, comptables. Coe s'ingénie pourtant à réentrecroiser leurs destinées, à conclure leurs attentes ou leurs drames. Le procédé ne manque pas d'artifice. Comme ces boucles qu'il faut boucler, alors que la vie ne cesse de tout dénouer au contraire et de tout laisser en attente. Si l'on était sévère, on dirait que se retrouve dans son intrigue un peu de cette fadeur désinvolte et feuilletonesque propre au Klapisch des « Poupées russes » et de « l'Auberge espagnole ». Mais pourquoi être sévère ? Pourquoi méconnaître le meilleur de Jonathan Coe, la belle tenue de son écriture romanesque, son regard si cruel sur son époque et si tendre sur ses personnages qui nous sont devenus à la longue fraternels ?

« Le Cercle fermé », par Jonathan Coe, traduit de l'anglais par Jamila et Serge Chauvin, Gallimard, 544 p., 22,50 euros.

Né en 1961 à Birmingham, Jonathan Coe a reçu en France le prix du meilleur livre étranger pour « Testament à l'anglaise » (1995) et le Médicis étranger pour « la Maison du sommeil » (1998). « Bienvenue au club », qui précède « le Cercle fermé », est paru chez Gallimard en 2003.

Par Frédéric Vitoux
Nouvel Observateur - 02/02/2006
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MessageSujet: Re: Le Cercle fermé par Jonathan Coe   Le Cercle fermé par Jonathan Coe Icon_minitimeJeu 2 Fév 2006 - 22:22

Le Cercle fermé de Jonathan Coe

Manuel Carcassonne
[02 février 2006] Le Figaro littéraire

La boucle est bouclée lorsqu'en fouillant sa mémoire on suspecte le passé d'avoir dérobé un bien précieux : le véritable amour.
LONGTEMPS, Jonathan Coe a été un écrivain qu'on pouvait résumer d'une expression : un jeune homme en colère.


Le travail du critique en était heureusement simplifié ; nous nous laissions aller à la facilité bien connue de le conserver à jamais en ce bocal étiqueté. Sous ses boucles d'ange né dans le Birmingham petit-bourgeois des rolling sixties, Coe est un terroriste des mots. Tressant la satire politique et la comédie sociale, allumant toutes les mèches qui couraient jusqu'au baril de poudre, combinant la recherche d'une structure formelle avec la facilité narrative, l'auteur so british de Testament à l'anglaise (prix du meilleur livre étranger en 1996) et de La Maison du sommeil (prix Médicis en 1998), mettait les rieurs de son côté. Et donc le public nombreux, les Français en tête, qui n'aiment rien tant que de voir l'Albion Resurgens, l'ennemie perfide d'outre-Manche hostile à l'euro et à l'escargot, brocardée, satirisée, conspuée, démythifiée, les têtes de Miss Thatcher maléfique et de Tony Blair souriant, promenées sur les piques, Jonathan Coe n'épargnant ni les conservateurs, ni les travaillistes, ni même la royauté.


A la parution de Like a Fiery Elephant, The Story of B. S. Johnson (Picador, inédit en français), le cours des choses s'inversa : la passionnante biographie d'un écrivain suicidaire, en vérité un manifeste de la création selon Coe, fascina les critiques et les jurés, notamment américains, qui viennent de l'inscrire au National Critic Book Award. La critique le dévisagea soudain, et lui pardonnant ses succès, le porta aux nues. Ah ! Serait-ce trop tard ? Nous avons le souvenir d'avoir vu à Londres, à deux pas des échoppes à la mode, un Jonathan Coe en séraphin émacié, soufflant sombrement sur sa tasse de thé, achevant en moine reclus sa biographie récit fleuve d'un inconnu, projet si fantasque, si peu en accord avec le temps.


Chez un écrivain maître de ses effets, rien de gratuit dans le choix d'un sujet personnel. Johnson, avant-gardiste compulsif en quête d'une forme artistique idéale parmi le chaos des possibles, polémiste type des années 60, a un air de ressemblance avec Benjamin Trotter, le héros, s'il devait n'y en avoir qu'un seul, de ce diptyque-fresque formé par Bienvenue au club et Le Cercle fermé.


Illusions perdues et rancoeurs
Trotter, né à Birmingham comme Coe lui-même, contemporain des Stones et des bombes de l'IRA, nostalgique du Social Worker travailliste, éclusant sa pinte de bière sur fond de revendications ouvrières et de jeux de fléchettes, a déçu ses amis de lycée, trop nombreux pour qu'on les cite tous, mais qui reviennent ici, marqués dans leur chair par les divorces, saoulés d'illusions perdues et assommés de rancoeurs. Le cercle se ferme : on est prié de comprendre «cercle» au sens du Ring wagnérien autant que comme le dérivé du club sélectif qui ne vous accepte pas. En place du créateur alliant musique et littérature au creux d'une oeuvre totale qu'il s'était promis d'écrire, Trotter s'est rangé, expert-comptable comme Johnson à ses débuts, marié à l'Église. Mélancolique et opaque, il fouille sa mémoire, suspectant le passé de lui avoir dérobé un bien précieux : le véritable amour. Son frère Paul Trotter, presque en négatif du premier, incarne la réussite des années Blair : député travailliste, libéral sans convictions, votant pour la guerre en Irak contre ses propres intuitions, obsédé par le rôle des médias, soucieux de les domestiquer sans comprendre qu'il sera au contraire impitoyablement manipulé, pantin de l'ère post-politique. Sa carrière trop rectiligne se fracasse contre l'illusion féminine, incarnée par Malvina, conseillère en communication, jolie figure romanesque avec les épaules étroites et le teint blafard des filles qui furent intelligentes trop tôt. Malvina bousculée par un monde trop mâle, cynique, étroit. Malvina, sa nièce, mais il l'ignorait.


Jonathan Coe, malgré des longueurs aisément repérables, tisse, en motifs entrelacés et virtuoses, l'intime et l'historique, la manifestation ouvrière de Longbridge après une restructuration sauvage et le maillot bleu abandonné dans un vestiaire de piscine, la charge anti-Blair et le brin de fougère qu'une fille trop aimée vous a donné, tel un serment, une nuit de pleine lune. Benjamin Trotter, à force de scruter la matière du passé, en ramène avec ses mains terreuses les vérités qu'il cherchait. Du chaos, il a sculpté peu à peu une forme reconnaissable. Avec tous ses défauts. Humaine.
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MessageSujet: Re: Le Cercle fermé par Jonathan Coe   Le Cercle fermé par Jonathan Coe Icon_minitimeJeu 2 Fév 2006 - 22:24

Littérature étrangère

Coe, la machine à démonter le temps
Jonathan Coe fait revenir vingt ans plus tard les héros de «Bienvenue au club». Ils ont vieilli, et retournent à Birmingham.

par Philippe LANÇON
Libération jeudi 02 février 2006


Jonathan Coe
Le Cercle fermé
Traduit de l'anglais par Jamila et Serge Chauvin.
Gallimard, 544 pp, 22,50 €.

Pour de nombreux lecteurs, le «bon gros» roman anglo-saxon est au «petit» roman français ce que le socialisme anglais doit être au nôtre : un facteur de complexes. Il semble toujours efficace et gagnant. Il est réaliste. Il jouit de sa croissance. Il raconte une histoire que la langue de l'écrivain anime sans perturber, sinon par quelques lourdeurs, bavardages et banalités ; mais le flux même de ces longueurs et lieux communs paraît donner du poids à la narration, comme s'il était garant du fait que le lecteur va retrouver ici la vraie vie, celle qu'il connaît ou, plutôt, croit connaître : le «bon gros» roman anglo-saxon a de solides poignées d'humour et d'amour. Ensuite, il construit et suit ses personnages tantôt de l'extérieur, tantôt de l'intérieur, avec lucidité, compassion et un sens de la scène et du détail qui, pour mieux les faire vivre, les tue régulièrement comme il faut : les apparences meurent une à une et leurs dépouilles enrichissent les présences. Enfin, le «bon gros» roman anglo-saxon multiplie en gymnaste les techniques de narration : c'est une demeure à poutres apparentes dont la charpente est assez solide pour tenir les murs et assez virtuose pour figurer au catalogue. Le Britannique Jonathan Coe est devenu un excellent fabricant de «bon gros» roman anglo-saxon.

Son nouvel ouvrage, le Cercle fermé, est la suite annoncée du précédent. Publié en France voilà deux ans et demi, Bienvenue au club contait la vie d'un groupe de lycéens et de leurs familles à Birmingham, ville natale de l'auteur, dans la seconde partie des années soixante-dix. Le roman commençait et finissait à Berlin, en 2003, par un dialogue entre deux enfants des personnages. Le duo d'adolescents se demandait ce qu'avaient bien pu vivre leurs parents, à quoi ressemblaient les années soixante-dix dans une ville ouvrière anglaise. Entre ces deux impromptus, un flash-back de 500 pages formait le roman. Il s'achevait en 1979, quand Margaret Thatcher allait être élue. On sentait que les histoires d'amour et les souffrances que chacun avait déjà vécues n'étaient rien au regard des désillusions qui allaient suivre.

Le Cercle fermé reprend les mêmes êtres vingt ans plus tard, de 1999 à 2003. Pour ceux qui n'auraient pas lu le premier volet, un synopsis le résume à la fin du livre : c'est cela, l'efficacité anglo-saxonne. Lire le Cercle fermé est sans doute une expérience différente selon qu'on a lu ou pas Bienvenue au club. Mais il faut bien avouer qu'ayant lu le premier en son temps, on avait tout oublié à l'entrée du second ­ et que les personnages ne sont revenus à la conscience que peu à peu, difficilement, sous l'effet des interminables discussions auxquelles ils se livrent pour décortiquer leur passé afin d'y trouver, non pas un avenir, mais des raisons de comprendre ce qu'ils ont vécu.

Le livre débute par un retour sur les lieux décrits dans une lettre. Claire Newman, qui n'apparaissait quasiment pas dans le précédent roman, revient à Birmingham après avoir vécu en Italie. Comme tant d'autres, elle lèche ses plaies. Un jour, elle a compris (ou cru comprendre) pourquoi l'homme qu'elle aimait ne serait jamais à elle : en le voyant sans qu'il le sache choisir avec soin des olives pour sa femme. Coe décrit fort bien ces scènes où un détail permet à un personnage (et au lecteur) de prendre conscience d'un monde qu'il ignorait et qui l'accable.

Claire décrit son retour à sa soeur absente, Miriam : la disparition de celle-ci était au coeur du précédent livre. Agée de 18 ans, elle avait une relation avec un responsable syndicaliste marié. Devant l'impasse, elle a fui ou s'est tuée. Claire trouvera la solution de l'énigme à la fin du Cercle fermé ; elle sera aussi triste qu'on le pensait, mais nettement plus absurde. L'artifice de la lettre à la disparue permet à Coe d'effectuer un long travelling dans Birmingham vingt ans après. Le lecteur est aussitôt un familier. L'histoire peut commencer sur le thème bien connu : que sont-ils devenus ?

L'un, Benjamin Trotter, menaçait de devenir romancier à l'issue de Bienvenue au club : il est expert-comptable et son roman n'est toujours pas achevé. Il a épousé une femme qu'il n'aime pas, mais avec qui il va à l'église. Ils n'ont pas d'enfants et meurent délicatement d'ennui. Son frère, Paul Trotter, est devenu un jeune député blairiste. Cynique, affamé d'apparences, assez peu spirituel et relativement crétin, il tombe amoureux de la jeune femme que son frère lui a présentée. Or, il est marié et père de famille : sa carrière risque d'en souffrir. Que va-t-il faire ? Et qui est, d'ailleurs, cette jeune femme venue de nulle part ? Autour des frères, on retrouve Doug Anderton, le fils du responsable syndicaliste, et l'austère Philip Chase, dont on apprend qu'il fut le mari de Claire Newman. L'un et l'autre sont devenus journalistes, mais ne vivent pas dans le même monde.

D'autres fantômes primaires ou secondaires s'agglomèrent peu à peu. Se frottant les uns aux autres, ils paraissent s'éveiller d'une torpeur que l'ellipse romanesque de vingt ans a entretenue en nous. Constat général : le mensonge et la dureté (dont Tony Blair est le symbole politique) ont réduit les voilures aimables de ce «peuple pâle». Second constat : les hommes ne cessent de détruire ce que les femmes rêvent de construire. Coe décrit cela par des scènes, des dialogues, des échanges de mails ou de lettres, des discussions au café ou autour de la table basse, et, bien entendu, par des coups de théâtre que la vie, parfois, ne mérite pas d'assumer.

Les personnages donnent le sentiment de dévorer sans fin la madeleine : il suffit d'un hasard (ou d'un romancier) pour qu'ils replongent dans une adolescence qui ne les a jamais quittés. S'ils avaient lu Harry Potter, ils sauraient qu'il ne faut pas retraverser le miroir dans lequel vivent les morts. Ils l'ignorent et, s'ils finissent par changer, l'impression demeure qu'ils pataugent dans une impasse britannique couverte de briques. La construction renforce cette impression par une symétrie naïvement affichée (que Coe rappelle dans les entretiens qu'il donne, comme si ses clients devaient entrer en cuisine pour mieux aimer le plat). Bienvenue au club comptait 28 chapitres par ordre croissant de numéro. Le Cercle fermé en compte également 28, mais par ordre décroissant : on finit au chapitre 1 et la conclusion se déroule de nouveau à Berlin, en 2003. Comme l'introduction du précédent roman, elle s'intitule «hiver». Les enfants pataugeront à leur tour dans la flaque noire formant le cercle dont les parents ne sortent pas.
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