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 Ni d'Eve ni d'Adam

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LP de Savy
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MessageSujet: Ni d'Eve ni d'Adam   Ni d'Eve ni d'Adam Icon_minitimeDim 24 Fév 2008 - 12:56

PARCE QU'ELLE LE VAUT BIEN
Anthony Palou, le Figaro Magazine, 14 octobre 2007.


A l'heure où la Belgique se déchire, une de ses plus célèbres et talentueuses ambassadrices littéraires rassemble toujours autant de lecteurs. Analyse d'un phénomène insubmersible.

Page 240 de «Ni d'ève ni d'Adam» *, le nouveau roman d'Amélie Nothomb, on peut lire ceci : «Un jour, le téléphone sonna. C'était Francis Esménard, les Editions Albin Michel. Il m'annonçait qu'il publierait Hygiène de l'assassin, le 1er novembre 1992, à Paris. Une nouvelle vie commençait.» Quinze ans déjà qu'à chaque rentrée littéraire, libraires et aficionados de la romancière piaffent de découvrir le nouveau roman de l'écrivain belge. Pour eux, septembre sans un Nothomb, c'est comme Noël sans cadeau. Impensable.

Le 1er novembre 1992, une nouvelle vie commençait donc pour Amélie, qui revenait de son cher Japon, ce pays dont elle raconta son expérience dans un de ses romans les plus fameux : Stupeur et tremblements (1999). Mais une nouvelle vie commençait aussi pour quelques milliers de lecteurs qui allèrent trouver chez cette étrange jeune fille au visage pâle comme de la craie, aux cheveux longs, noirs comme les plumes du corbeau, quelque chose qui faisait jusqu'ici défaut dans leur bibliothèque : une certaine fantaisie enchanteresse.

On pourrait trouver plusieurs raisons à la longévité du succès d'Amélie Nothomb. La première serait sans doute ce créneau abandonné depuis longtemps par les écrivains : le conte. Bien que, sur la couverture de ses livres, invariablement on puisse lire le mot roman, il s'agit pour la plupart d'histoires simples où la réalité est bousculée par des phénomènes étranges. Chez Nothomb, le fantastique n'est jamais extraordinaire : il naît curieusement du quotidien. Exemple : les voisins dans Les Catilinaires. La deuxième raison - consubstantielle à la première - est la morale, à ne pas confondre avec le moralisme. Nothomb est une héritière des écrivains du XVIIIe siècle. Dans Ni d'Eve ni d'Adam - fable sur l'amour -, la romancière analyse la relation entre l'amour et le mal. Comment peut-on être amoureux d'une personne qui serait incapable de vous faire du mal ? Rinri, le jeune Japonais qui veut l'épouser, est trop gentil pour elle. La gentillesse en amour ne doit être que le résultat d'un combat. Elle se gagne, elle se mérite. Masochiste, Amélie ? Lucide. Un de ses romans préférés n'est-il pas Les Liaisons dangereuses ? Ainsi, troisième raison, les romans de Nothomb peuvent-ils être considérés - au sens large - comme des romans philosophiques. L'amour, le bien, le mal, la fuite, la faim, le travail, l'Autre, la différence, autant de concepts traités simplement - et avec un gai savoir - par la romancière. Pas de référence ou presque. Platon (dont elle aime emprunter la technique du dialogue, la maïeutique), Aristote ou encore Nietzsche sont, dans son oeuvre, les plus cités. Nothomb, c'est l'alliage parfait de la métaphysique et de l'ordinaire, de l'esprit et du corps. Les nourritures sont physiques et spirituelles. Manger un poulpe encore vivant est une expérience philosophique au même titre que le passage du temps. Le corps est un lieu de réflexion, le terrain d'expérimentation de mon être. La boulimie ou l'anorexie deviennent ainsi, sous la plume de Nothomb, des schèmes à part entière.

La simplicité de la langue - quatrième raison - fait partie de la subtile panoplie littéraire de la romancière. Ou plutôt l'apparente simplicité. La phrase ne cherche pas midi à quatorze heures, mais le sens, parfois, est plus subtil qu'il n'y paraît. N'oublions pas que Nothomb est philologue. Dans Ni d'Eve ni d'Adam, la scène de la demande en mariage est un exemple de la perversité du langage. Enfin, Amélie Nothomb est ce genre de personnage que les médias adorent. Exubérant mais timide, volubile mais secret - bref, romanesque. L'alcool, la vitesse, les pieds nus sur les pédales, les casinos ont poursuivi Sagan jusqu'à sa mort. On ne parlera donc pas des chapeaux, mitaines, godillots, rouge à lèvres ou autres fruits pourris attachés à jamais comme des poissons d'avril à la tunique d'Amélie Nothomb. Lisons plutôt son dernier roman, considéré à l'unanimité comme un très bon cru, bon château, bonne année.

Une dernière chose : il est très agréable et même très reposant de lire un roman sans la moindre scène de sexe. Fait assez rare dans nos lettres contemporaines pour être remarqué.

* Albin Michel, 245 p., 17,90 euros.
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