Propos insignifiants
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 Réponse aux Perpendiculaires

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LP de Savy
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Date d'inscription : 06/04/2005

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MessageSujet: Réponse aux Perpendiculaires   Réponse aux Perpendiculaires Icon_minitimeJeu 29 Sep 2005 - 22:05

Rien, voilà l'ordre

Les cibles choisies par les membres de la Revue perpendiculaire trahissent la nature de leur ressentiment. C'est leur haine de la littérature, de la liberté de ton et de l'esprit critique qui fait d'eux des brûleurs de livres.

Aujourd'hui, les clowns ignares osent ricaner des écrivains qui savent penser et aiment écrire. Demain, ils les dénonceront aux flics. Et après-demain ils nieront que la littérature a existé.

La tribune publiée dans Le Monde par le comité de rédaction de la Revue perpendiculaire sous le titre Houellebecq et l'ère du flou le 10 octobre 1998 n'avait rien d'un manifeste esthétique : c'était une rafle. Dans une grande confusion d'arguments et de sophismes, cinq personnes étaient particulièrement visées : Michel Houellebecq, Philippe Muray, Benoît Duteurtre, Renaud Camus et Dominique de Roux. Comme par hasard, cinq écrivains. Cela confirme ce que l'ont savait : les Perpendiculaires sont à la littérature ce que les procès de Moscou étaient à la justice et l'Inquisition à l'esprit évangélique.
Leurs échecs éditoriaux, que n'a pas empêché une couverture médiatique aussi dense qu'un tapis de bombe sur l'Irak, en ont fait des brûleurs de livres, des anathémiseurs qui rêvent de faire l'ordre par le vide. Il faut ici de reprendre cas par cas l'instruction. Leurs accusations, même lorsqu'elles s'appuient sur des approximations ou des aberrations, ont un sens. La contradiction n'est qu'apparente : le choix de leurs victimes prouve, par l'absurde, leur bon goût.

Premier visé, Michel Houellebecq. Il était depuis quelques mois l'idole des Perpendiculaires qui l'avaient tardivement invité à rejoindre leur groupe. Il l'ont exclu cet été, jugeant son dernier roman hérétique. Le plus drôle, dans l'affaire, est que ces Pinard du pauvre ont organisé un ridicule petit procès dans lequel ils ont sommé Houellebecq de s'expliquer sur le contenu des Particules élémentaires . Comme ses justifications ne leur ont pas convenu, ils l'ont épuré. Voilà une étrange manière d'envisager la littérature.
De deux choses l'une, soit Michel Houellebecq véhicule des fantasmes eugéniques et totalitaires comme ils le prétendent aujourd'hui. Dans ce cas, les Perpendiculaires , non contents de ne pas savoir écrire, ne savent pas lire. En effet, Les Particules élémentaires , pour qui a lu Rester vivant , La Poursuite du bonheur , Extension du domaine de la lutte , et surtout cet étrange Lovecraft publié au Rocher, reprennent et approfondissent des thèmes qui ont toujours hanté le romancier. Soit il s'agit d'une très vilaine jalousie. C'est hélas l'hypothèse la plus probable car nous avons du mal à imaginer que la Revue perpendiculaire hier, ou Les Inrockuptibles aujourd'hui, se soient faits un instant les promoteurs de l'idéologie d'Alexis Carrel ou de Vacher de Lapouge. Le plus drôle est que Houellebecq se voit aujourd'hui reproché par ses anciens amis un entretien accordé à Immédiatement en 1996 que ces derniers connaissaient très bien, même si Houellebecq avait pris soin de le faire disparaître de son recueil Interventions , comme d'ailleurs il a pris soin de faire disparaître ses articles parus dans L'Idiot international . Par les temps qui courent, on n'est jamais trop prudent. Nous y parlions du Moyen Age, de la communion des saints, de Bernanos, de Péguy, de Dostoïevski, de Pascal, de Kant. Rien de national-révolutionnaire ou de fascisant , nous semble-t-il. Nous avons choisi de le republier dans son intégralité pour que chacun puisse se faire une idée.

Le cas de Philippe Muray est plus étonnant. Les Perpendiculaires l'accusent d'avoir émargé au Figaro magazine de Pauwels alors qu'à l'époque, il écrivait ce monument qu'est Le XIXe siècle à travers les âges , dans la collection de Philippe Sollers contre lequel il ne s'est retourné qu'à la fin des années quatre-vingt. Il est vrai que Le XIXe siècle à travers les âges montrait de manière brillantissime que l'humanitarisme d'un monsieur Homais était de tous les temps. Des choses qui ne peuvent que déplaire à La Revue perpendiculaire , nid de petits pharmaciens positivistes confondant la littérature avec une préparation officinale. On sait aussi que Muray est l'auteur d'un roman capital et monumental, On ferme , à peu près passé inaperçu mais qui rend quand même jaloux les Perpendiculaires, experts en fictionettes pseudo-avant-gardistes où l'alibi sociologique masque difficilement la vacuité et l'incapacité à dire le monde tel qu'il ne va pas. Muray a su le faire implacablement, en grand lyrique désespéré. Les cancres vaniteux de Perpendiculaires ne lui pardonnent pas.

Benoît Duteurtre, maintenant. Il à l'âge des Perpendiculaires, mais il est beaucoup moins bête. La preuve : il se fait attaquer par Michel Onfray, le chien de garde des bien-pensants qui préfère s'intéresser à la façon dont bouffent les philosophes qu'aux banlieues qui crament. Duteurtre a commis un crime grave : dans Requiem pour une avant-garde , il dit en termes un peu plus choisis que Boulez est un gros con académique qui a beaucoup fait pour que la musique contemporaine n'intéresse plus personne. Il est aussi l'auteur d'un roman Tout doit disparaître , véritable précis de décomposition, impitoyable analyse des conditions faites à l'artiste aujourd'hui. Duteurtre, parangon de l'intelligence critique et de l'esprit qui toujours nie, est aujourd'hui un suspect, puisqu'une pensée critique est nécessairement une pensée fasciste dans l'univers mental des Perpendiculaires.

Renaud Camus C'est une des voix les plus secrètes et les plus essentielles de notre littérature. Pour lui, le monde est un texte, et ce texte est l'objet d'un désir inépuisable. On se souviendra ici, par exemple, de Roman roi et Roman furieux . Camus y racontait le destin du dernier roi de Caronie, un pays imaginaire, une Roumanie dont les mythes fondateurs auraient été ceux du Portugal. Son érudition ludique, borgésienne, se doublait d'une magnifique méditation sur l'être et le non-être, l'émouvante dialectique de la présence et de l'absence. Que lui reprochent les Perpendiculaires ? Sans doute son journal intime. Il montre que les temps qui sont les nôtres mettent à rude épreuve l'économie intime de ces dinosaures qu'on appelle les artistes, tellement gênants pour les délateurs, petits flics et autres moralistes. Le journal de Renaud Camus est un répertoire assez minutieux de tous les mauvais coups qu'une société au mieux de sa mesquinerie sait infliger à un artiste. Il ne cesse de traquer les travers d'une époque dominée par l'idéologie sympa , où sous prétexte de sincérité , la goujaterie des m urs et des idées est devenue monnaie courante. Comment se fait-il, demande Renaud Camus, qu'un tel divorce existe aujourd'hui entre culture et civilisation, entre savoir et savoir-vivre ? Pourquoi faut-il que tout le monde, même les intellectuels, s'expriment dans une novlangue fautive ? Formé à la rude école de la sémiologie, disciple de Barthes -- certainement un fasciste notoire pour les Perpendiculaires -- Camus sait bien que tout fait signe aujourd'hui et que la dégradation d'une langue et d'une syntaxe est le symptôme le plus patent d'un totalitarisme informel, informulé mais indéniable. Contemporain capital réfugié dans un château de Gascogne où il fait tant pour l'art contemporain, Camus ne peut pas plaire aux néo-puritains dont la tolérance à des couleurs de salle de commissariat. En plus, il est publié chez POL, une maison dont chacun sait qu'elle participe activement à la lepénisation des esprits . Que ceux qui possèdent ses livres les cachent. Demain, ils seront brûlés en place publique.

Quant à Dominique de Roux, nos lecteurs pourront se reporter au numéro 3 d'Immédiatement dans lequel nous rendons hommage à son itinéraire et à son oeuvre suffisamment complexes pour ne pas pouvoir être épinglés avec des qualificatifs ramassés dans le ruisseau de la polémique journalistique. Dans cette livraison d'Immédiatement , on peut également lire des aphorismes inédits comme celui-ci : Capitalisme : aboutissement suprême du combat pour l'autre monde. Autrefois, dans les temps de vie monastiques. Roi et paysans se cotisaient pour qu'ils n'aient pas à tuer le lièvre. Il viendra peut-être à l'idée de ceux qui voient des nationaux-révolutionnaires partout que le lièvre, c'est le style, cette chose insupportable pour ceux qui n'en ont pas. Les Perpendiculaires, qui ne sont ni des rois ni des paysans, mais des procureurs Pinards toujours prêts à condamner Madame Bovary et Les Fleurs du mal , ont décidé de s'en débarrasser. Ils l'ont rebaptisé fascisme pour déchaîner la meute.

Sébastien Lapaque et Jérôme Leroy (www.immediatement.com)
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