Propos insignifiants
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 Les enfants de personne

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Sébastien
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MessageSujet: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeMar 12 Avr 2005 - 16:46

DÉBAT Natacha Polony et Jacques de Guillebon, l'une de gauche, l'autre de droite, s'insurgent contre l'idéologie de mai 68

«Jetez vos télés et vos plats cuisinés !»

Ils ont moins de 30 ans et clament haut et fort qu'ils sont réactionnaires. L'une est de gauche, l'autre de droite. Tous deux s'insurgent contre la «génération 68» qui, en confisquant l'héritage culturel, a laissé ses enfants devenir des «barbares». Natacha Polony, 29 ans, agrégée de lettres modernes, chargée des pages éducation de l'hebdomadaire Marianne, publie un «petit traité sur la fracture générationnelle» non dénué de pertinence. Le titre se passe de commentaire : Nos enfants gâchés (Lattès). Jacques de Guillebon, 25 ans, animateur de la revue Immédiatement, a écrit de son côté un essai comme on dégaine une arme : Nous sommes les enfants de personne (Presses de la Renaissance).

[12 avril 2005]


LE FIGARO. – De quel ordre est cette fracture que vous décrivez entre la «génération 68» et les suivantes ?


Jacques de GUILLEBON. – Nous sommes les fils sans père de cette génération qui a rompu le lien avec le passé, refusant de transmettre parce qu'elle s'est imaginée être le point d'aboutissement des temps.

Natacha POLONY. – L'escroquerie commise par cette génération consiste à détruire, au nom de l'égalité, l'école dont elle avait bénéficié, celle où des maîtres instruisaient selon des règles. Désormais, celui qui représente l'autorité est détestable, alors que Mai 68 n'aurait pas existé sans la figure du père, celle d'un de Gaulle.


J. G. – Nous, les trentenaires, avons conscience que nous avons manqué de pères. Les nouvelles générations, elles, n'ont même plus les armes culturelles pour se rendre compte qu'elles auraient pu en avoir un... Nous avons eu la chance de ne pas vivre sous la coupe de cette grande puissance «décérébrante» qu'est la télévision, ni au contact permanent de la technologie.

N. P. – Ceux qui ont moins de 25 ans appuient sur un bouton pour effectuer une tâche qui autrefois prenait du temps. Cela modifie complètement leur rapport au réel. Car, pour assimiler la notion d'effort, il est nécessaire de comprendre que le temps est une contrainte. Il faut retrouver un ancrage spatio-temporel. La culture, qui n'est plus transmise comme il faut, comprend aussi les paysages, les traditions, la nourriture, un certain rapport sensoriel à la nature, toutes choses dont la disparition fabrique un monde virtuel.



Y a-t-il d'autres exemples dans l'histoire d'une pareille rupture de la transmission ?


N. P. – A-t-on déjà vu une civilisation décider que les vieux n'avaient rien à apprendre aux enfants ? Que la jeunesse serait l'aboutissement de l'humanité ? Nous assistons à un renversement des rapports temporels.

J. G. – Je pense que ce renversement a déjà eu lieu en 1789.

N. P. – La Révolution française s'est faite au nom de valeurs universelles et intemporelles. Il n'y a pas eu, avec elle, une apologie de la nouveauté, de la spontanéité.

J. G. – N'empêche, la culture humaniste, qui était celle de la Révolution, a signé son arrêt de mort en lançant le mouvement de déchristianisation. Elle a ainsi détruit son propre substrat, ce sur quoi sont assises ses valeurs de liberté, d'égalité, de fraternité.


N. P. – L'humanisme ne peut exister sans une culture tout court, et notre culture est judéo-chrétienne et gréco-romaine. Relisons le discours aux morts de Périclès, dans La Guerre du Péloponnèse. On y trouve une pensée de la liberté et de l'égalité qui est parmi les plus abouties ! On n'est pas obligé de croire en un dieu transcendant pour apprécier et respecter ces valeurs.


Comment sortir de cette impasse ?



N. P. – Toutes les institutions chargées de la transmission – la famille, les Eglises, les partis – ont été détruites. L'école est le seul levier sur lequel on puisse encore peser. Il faut donc la recentrer sur la transmission des savoirs, réviser les programmes, redonner les heures pour les enseigner en supprimant toutes ces choses inutiles, l'hygiène, le Code de la route, etc. Arrêtons aussi ce dressage de singes citoyens, abandonnons ces heures de vie scolaire où l'on explique aux jeunes que «la violence c'est mal et qu'il faut parler» ! Que peuvent-ils bien raconter ? Ce mot, que j'emprunte à un prof de philo, résume tout : «On leur a donné la parole sans leur donner les mots.» Revenons à l'idée que le savoir permet de structurer l'esprit, de comprendre qui l'on est.


Vive l'école d'autrefois ?



N. P. – Pourquoi le retour en arrière est-il considéré comme la faute absolue ? J'entends des enseignants dire : «Vous ne voulez tout de même pas qu'on utilise les méthodes d'il y a trente ans !» Et pourquoi pas, si elles sont efficaces ? Mais cette parole-là, jugée réactionnaire, est proscrite.


Jacques de Guillebon, vous dressez un tableau apocalyptique de l'avenir. En même temps, l'espérance chrétienne vous habite. Tout détruire pour qu'un monde nouveau advienne ?


J. G. – Ce n'est pas la peine de détruire, tout se décompose de l'intérieur... Je ne pense pas que l'école, même réformée, pourra redresser la barre. L'école, autrefois, était adossée à une société où les enfants étaient intégrés à des rapports sociaux, recevaient une éducation, des savoirs ancestraux. Comment l'école peut-elle instruire dans un monde qui n'a pas d'autre référent que la télévision ?


N. P. – Jetez vos télévisions, jetez vos plats cuisinés ! Un exemple que m'a rapporté un pédiatre qui exerce à la campagne : bien que toutes les familles aient un potager, les parents donnent à leurs enfants des petits pots. Les légumes du grand-père ? Ils les jettent ! Il ne leur vient pas à l'esprit de rendre utile le travail de la terre de l'aïeul, ce qui permettrait à l'enfant d'acquérir l'idée qu'il y a une transmission dans les générations, celle très concrète de la nourriture ; de comprendre ce que c'est que de faire naître, germer quelque chose, dans un temps donné.

J. G. – On préfère acheter que de faire soi-même !


N. P. – Exactement. Cette anecdote révèle aussi à quel point les rapports mercantiles se sont étendus à l'ensemble de la société. La multiplication des entreprises de soutien scolaire, par exemple, fait disparaître des rapports humains. Ceux que l'on tissait avec le fils de la voisine, qui aidait à réviser ses leçons. Tout rapport politique et social devient marchand. Réintroduisons du politique ! J'aime la notion d'aïdos, la dignité, que l'on trouve chez Aristote, notamment, l'idée que l'on existe au sein d'un groupe et que l'on est responsable devant les autres.


Jacques de Guillebon, est-ce que cela rejoint les valeurs héroïques que vous prônez ?


J. G. – Oui, bien sûr. Mais je ne pense pas que l'on puisse restaurer la France qui est en train de se fragmenter en communautés autonomes portant chacune une vision différente du monde et de l'homme.

N. P. – Le délitement est inéluctable. Et dites-vous bien que l'on n'a pas encore touché le fond. La question qui se pose, c'est celle des moyens dont on dispose pour limiter la période obscure, ce que l'on appelait naguère les temps barbares. La question est de savoir si on peut encore préserver certains champs de liberté, de savoir, pour construire quelque chose de neuf, le moment venu.
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Fabien
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MessageSujet: Re: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeMar 12 Avr 2005 - 17:36

Il n’y a aucun espoir à attendre de l’Ecole et de l’Education Nationale tant qu’elle sera noyautée par des profs de gauche, relayés par des associations de parents non représentatives, qui se croient toujours obligés d’applaudir à la moindre revendication de leurs élèves, sans soute « en souvenir du bon vieux temps », comme on a pu le voir encore à l’occasion de la risible « révolte des lycéens ».

A part ça, ce texte est « interpellant », comme on dit, bien qu’un peu schématique. Le problème selon moi n’est pas spécialement mai 68, ni la télévision, mais est bien plus profond, c’est toute cette idéologie de gauche qui a sapé depuis longtemps les bases morales et spirituelles de notre civilisation au nom de l’égalitarisme et du nivellement par le bas. Alors, cette « réac de gauche » avec ses légumes me fait bien rigoler : avec des gens comme ça, passé le petit coup de gueule contre les anciens sans doute pour prendre leur place, on retomberait bien vite dans les mêmes travers, le « retour du politique » comme elle dit ne serait que le retour à la bonne vieille idéologie archaïque anti-fric, anti-marchands, anti-technologie, anti-bourgeois, anti-religion, etc… On ne se refait pas !

J’ai bien peur en effet qu’on ne soit obligés de toucher le fond avant de pouvoir remonter à la surface. Et que la France fonctionnarisée, assistée et communautarisée, et toujours insatisfaite sans savoir pourquoi, ne soit le pays le plus «mal barré » de ce qui reste de la civilisation occidentale.
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Sébastien
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MessageSujet: Re: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeMar 12 Avr 2005 - 23:55

Bernard B a écrit:
J’ai bien peur en effet qu’on ne soit obligés de toucher le fond avant de pouvoir remonter à la surface

Je ne vois aucune espèce de lueur à l’horizon. Rien ne bouge dans ce pays, « prêt à tenir le monde entier pour responsable de ses problèmes, plutôt que d’en reconnaître les causes réelles. » (Paul Krugman, économiste américain, cité dans le dernier numéro de L’Imbécile) On en a un nouvel exemple avec le référendum portant sur la Constitution, pour lequel je crains que le non l’emporte. Les Français se désintéressent de ce débat, alors que leur avenir est en jeu. Et quand ils s’y intéressent, on a droit à des débats surréalistes sur l’Europe accusée d’être trop libérale, responsable des délocalisations, de la montée du chômage… Quelle bouffonnerie !

De toute façon, je suis persuadé que le projet européen va se planter, épuisé par une culture du compromis et un juridisme desséchant. Franchement, quand on lit cette constitution, ça ne donne pas très envie de voter oui. Trop long, trop complexe, trop mal écrit. L’Europe se meurt parce qu’elle a perdu la foi. Sans spiritualité, on ne fait pas rêver les gens. En outre, elle n’a rien à transmettre à ses citoyens ; au contraire, elle les invite à se détourner de leur passé chrétien, au nom d’un projet dont rien ne permet d’entrevoir les limites. Comment construire une identité dans ces conditions ? La France risque de porter le coup de grâce à une construction européenne qui bâtit sur du vide.

A moins d’un sursaut. Ne rien attendre des hommes mais tout de Dieu, comme Bloy.
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Fabien
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MessageSujet: Re: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeMer 13 Avr 2005 - 11:00

Sébastien a écrit:
Rien ne bouge dans ce pays, « prêt à tenir le monde entier pour responsable de ses problèmes, plutôt que d’en reconnaître les causes réelles. » (Paul Krugman, économiste américain, cité dans le dernier numéro de L’Imbécile)

Oui ça rejoint une autre de mes réflexions : les Américains ne nous considèrent plus très bien, parfois pour de mauvaises raisons (notre opposition à la guerre en Irak), mais aussi pour de bonnes (pays de dégonflés, de couards, de « surrender »). J’ai bien peur que maintenant ce ne soient les autres pays Européens qui embrayent, si le non l’emporte : pays de frileux, d’assistés, de fonctionnaires, de protectionnistes, d’éternels râleurs.

Ceci dit je ne suis pas aussi sévère que toi sur la construction européenne : elle vaut ce qu’elle vaut mais la seule solution est d’aller de l’avant, je ne peux pas imaginer une seconde chaque pays se retournant vers lui-même. Ou alors, on risque d’avoir le pire des scénarios : l’Europe continuant à se faire et la France, et peut-être la GB, isolées. Je ne suis pas si sûr non plus que l’Europe se meurt faute de spiritualité. Mais tu as raison de poser la question.
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Fabien
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MessageSujet: Re: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeVen 15 Avr 2005 - 18:16

Ca a inspiré le Stalker :

http://stalker.hautetfort.com/archive/2005/04/13/nous_sommes_encore_les_enfants.html

Ben alors, ça dort là-dedans ? On se croirait chez EV, ma parole ! Evil or Very Mad
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LP de Savy
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MessageSujet: Re: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeSam 16 Avr 2005 - 23:17

On peut aussi parler de marchandisation du temps. Le dimanche était par exemple un jour protégé de l'espace marchand, un jour réservé au don. Avec la chute du religieux, il a perdu son aspect sacré. Il peut être désormais consacré au Dieu commerce.
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Sébastien
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MessageSujet: Re: Les enfants de personne   Les enfants de personne Icon_minitimeDim 17 Avr 2005 - 11:46

LP de Savy a écrit:
Le dimanche était par exemple un jour protégé de l'espace marchand, un jour réservé au don. Avec la chute du religieux, il a perdu son aspect sacré. Il peut être désormais consacré au Dieu commerce.

Voilà à quoi on aboutit quand on a réduit la religion à la sphère privée. « Ce qui est par conséquent inacceptable, parce que contraire à l’Evangile, c’est la prétention de réduire la religion au domaine strictement privé, en oubliant paradoxalement la dimension essentiellement publique et sociale de la personne humaine. » (Jean-Paul II, cité dans Le politique et le sacré de Falk van Gaver.)

Le temps a une dimension symbolique, structurelle. Si celle-ci est niée, c’est la conception utilitaire qui prévaut. « Les atomes du temps sont les éléments du gain », écrit un inspecteur de fabrique cité par Marx dans le fameux chapitre X du Capital. Le monde moderne est fondamentalement niveleur et antichrétien.

Nous sommes encore les enfants de nos pères, certes, mais pour combien de temps encore ? Combien de personnes se considèrent de nos jours comme des héritiers ?

« Mais la crispation laïque ne tiendra pas : après avoir tout désacralisé, elle veut être la dernière sacralité, et se re-sacraliser. Et cela ne marchera pas, car elle a sapé les fondements mêmes de cette vaine et naïve tentative de re-sacralisation à son profit, comme si pouvaient revenir Valmy et les hussards noirs de la République, et la déesse Raison nue aux autels. Mais non, on ne croit plus en Raison, on croit en Nombril, en Ego, aux astres et aux stars, en Rien, et la réaction laïque sera balayée bientôt d’un revers de la main, par la révolution religieuse. » (Falk van Gaver)

Qui a dit que les jeunes gens étaient pessimistes ?
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